
L’examen de Josep Borrell devant le Parlement européen. Une analyse de Teresa Freixes
Les membres du Parlement européen posent des questions, interrogent et évaluent si les futurs membres de la Commission européenne sont dignes d’occuper le poste qu’ils sollicitent. Borrell a réussi l’examen « avec mention ».
| Edit. Salvador GARCÍA BARDÓN
-oOo-

L’examen de Josep Borrell devant le Parlement européen. Une analyse de Teresa Freixes
Par
8 octobre, 2019
.
Les frontières sont les cicatrices que l’histoire a laissées gravées dans la peau de la terre. Gravées au sang et au feu. N’en dressons pas d’autres !
.
Cette phrase, que Josep Borrell avait déjà prononcée dans son allocution du 8 octobre 2017 lors de la massive manifestation constitutionnaliste de Barcelone, lui a servi aujourd’hui aussi pour répondre à l’interpellation qu’un eurodéputé défenseur des identités nationales lui a adressée pendant « l’examen » auquel il a été soumis, au Parlement européen, comme « haut représentant » pour la politique extérieure proposé par les États membres et la Présidente de la Commission européenne. Avec cette phrase, Borrell a voulu exprimer sa position face aux populismes nationalistes, même si certains lui reprocheront de ne pas avoir lancé d’invective contre ceux qui sont présents en Espagne, concrètement en Catalogne. Mais celui qui a voulu comprendre a compris.
.
Borrell a réussi l’examen « avec mention ». Cela a été un débat d’experts, où il a dû répondre autant à des questions spécifiques en lien avec les fonctions concrètes qu’il va devoir remplir dans son futur poste, qu’à des questions relatives à ces problèmes mondiaux que nous avons tous à l’esprit, bien que parfois il semble que nous ne voulions pas les expliciter : les guerres, le terrorisme, les inégalités, la manipulation informative…
.
Avec un ordre méthodologique calculé au millimètre, les intervenants l’ont interrogé sur tout cela et Borrell a donné des réponses complètes, avec cette fine ironie qui le caractérise lorsque les questions ont porté sur des thèmes qui auraient pu être plus qu’incisifs, et avec des données et des arguments précis et solides pour les grandes questions. Ceux qui assistaient au débat ne se sont pas ennuyés une seule minute.
.
Quelle différence avec les débats parlementaires au Espagne et (aussi) en Catalogne ! On respectait les temps, on avait préparé les questions et le candidat avait une réponse pour tout. Bon, pour presque tout, comme il a reconnu à un moment, pour ne pas se mettre sur le territoire d’autrui. Parce que, dans son futur poste, le haut représentant pour la politique extérieure de l’UE sera aussi, et pour cette raison, Vice-président de la Commission européenne et, en outre, il devra coordonner l’action extérieure des États membres au Conseil, par disposition expresse de certains Traités dont il a largement démontré connaître le contenu durant le débat.
.
Il en est bien sorti et il en est sorti renforcé. Il a dû mouiller sa chemise durant trois heures. Le contraire aurait pu se passer, puisque, lors de ces auditions des candidats commissaires, deux ont été refusés par le Parlement européen (ceux de Hongrie et Roumanie) et d’autres ne savent pas encore clairement s’ils seront finalement acceptés (ceux de France, Pologne et Suède).
.
Pouvez-vous imaginer que, dans notre Congrès des Députés, ou au Parlement de Catalogne, les futurs ministres ou conseillers devraient passer un examen semblable et pourraient être refusés par la Chambre ? Les élus dialoguant, interrogeant et évaluant le fait qu’un candidat ministre puisse être considéré compétent et adéquat pour le poste. Et bien cela se passe à l’Union européenne. Les membres du Parlement européen posent des questions, interrogent et évaluent si les futurs membres de la Commission européenne sont dignes d’occuper ces postes. Pour qu’on puisse dire après, comme certains l’ont fait, qu’il vaut peut-être mieux que nous reposions la question de la pertinence à ce « club décadent d’états antidémocratiques » qui n’ont pas de « sensibilité » envers ce que veut « le peuple ».
.
Par Teresa Freixes
Teresa Freixes est professeure ordinaire de droit constitutionnel à l'Université Autonome de Barcelone, professeure ordinaire Jean Monnet "ad personam" de l'Union européenne et Secrétaire générale de l'Académie royale européenne des Docteurs.
Source : El ‘examen’ de Josep Borrell ante el Parlamento Europeo. Un análisis de Teresa Freixes
◊◊◊