Teresa Freixes : Deux cas pour l’UE : prisonniers et évadés de la justice espagnole

La législation européenne renvoie à la nationale, pour tout ce qui concernel’inéligibilité ou l’annulation hypothétique du mandat d’un eurodéputé élu.

Teresa-Freixes-Sanjuan

Depuis Bruxelles nous remercions pour son geste Teresa Freixes Sanjuan (1), professeure de Droit constitutionnel de la Universitat Autònoma de Barcelona et professeure de la chaire  Jean Monnet "ad personam" en Europäische Union, en mettant à la disposition de tous les lecteurs l’article « seulement pour abonnés » qu’elle a consacré, sur younews.larazon.es, à la situation juridique des prisonniers et évadés de la justice espagnole, responsables du Procés, en tenant compte du fait que, pour l’UE, il s’agit de deux cas différents :

"En concordance avec ce que j’expose dans cet article, aujourd’hui le Parlement européen a refusé l’accréditation provisoire de Puigdemont et Comín, considérant que leur situation juridique est douteuse, étant donné qu’il n’est pas clair que la "Junta Electoral Central" va les accréditer, en fonction de la législation espagnole en vigueur.

Comme l’article est réservé aux abonnés, je retranscris ici son contenu complet."

Salvador García Bardón

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Teresa Freixes

La situation juridique des prisonniers et évadés

Après les élections européennes du 26 mai, nous pouvons nous demander si nous allons voir assis sur les sièges du Parlement européen deux évadés de la justice et un accusé de graves délits contre l’ordre constitutionnel en cours de jugement devant le Tribunal suprême. Peut-être que oui, mais le plus probable est que cela ne sera pas.

 Les élections européennes se basent, quant au système électoral, sur celui qui est en vigueur dans chaque État membre. Nous n’avons pas de système électoral « européen », mais seulement des « principes communs » qui sont seulement des règles d’orientation, comme par exemple que le système soit proportionnel, que le représentation de deux sexes soit équilibrée et qu’il n’existe pas de circonscriptions énormes, pour donner visibilité à toutes les zones des territoires et pour rapprocher la valeur du vote, puisqu’il y a, dans l’UE, des États avec plus de 80 millions d’habitants et d’autres qui n’arrivent pas au million.

Ainsi, donc, la configuration des candidatures, les exigences d’éligibilité des candidats, se basent sur les règles de chacun des États, dans notre cas, sur la "Ley Orgánica del Régimen Electoral General", les règlements des chambres et, dans son cas, la législation administrative et pénale. Et c’est ainsi depuis qu’a été approuvé l’Acte relatif à l’élection des représentants au Parlement européen par suffrage universel direct, en 1976, qui, selon ses propres dispositions, sera d’application jusqu’à ce que soit approuvé le processus électoral uniforme (approbation qui ne s’est pas encore produite). Ainsi, donc, nous élisons les eurodéputés, quant à la réglementation applicable, comme si nous élisions des députés au Parlement national.

Le Parlement européen, pour sa part, compte sur un règlement intérieur, dont l’art. 3 prévoit textuellement : « La commission compétente veille à ce que toute information pouvant affecter l’éligibilité des députés ou l’éligibilité ou l’ordre de classement de leurs suppléants soit communiquée sans retard au Parlement par les autorités des États membres ou de l’Union, avec mention de la prise d’effet lorsqu’il s’agit d’une nomination. Lorsque les autorités compétentes des États membres entament une procédure susceptible d’aboutir à la déchéance du mandat d’un député, le Président leur demande à être régulièrement informé de l’état de la procédure, et en saisit la commission compétente, sur proposition de laquelle le Parlement peut se prononcer. » Donc, pour ce point aussi, la réglementation européenne renvoie à la nationale, pour tout ce qui est relatif à l’inéligibilité ou à l’annulation hypothétique du mandat d’un eurodéputé élu.

Ainsi donc, comme en dispose la législation espagnole, il sera nécessaire que les trois élus dont nous parlons, pour consolider la condition de députés européens, en accord avec la législation intérieure, retirent leurs lettres de créance devant la "Junta Electoral Central", à la Chambre des Députés, et promettent ou jurent, tel qu’il est légalement prescrit, fidélité à la Constitution espagnole. Ici apparaissent deux variables, puisqu’il s’agit d’un élu qui est en détention provisoire et de deux autres qui sont en fuite de la justice espagnole.

En ce qui concerne Monsieur Junqueras, qui est en détention provisoire, nous pouvons avancer que le plus probable est qu’on suive la même procédure que pour obtenir la condition de député à la Chambre, c’est-à-dire que le Tribunal suprême l’autorise à se présenter à la Chambre pour retirer les lettres de créance et prêter serment devant la "Junta Electoral Central", après quoi, tant qu’il sera en situation de détention provisoire, ses fonctions seront suspendues et, comme le prévoit le Règlement intérieur du Parlement européen, elles devront être transférées à la dite Chambre. 

La situation procédurale des deux autres députés européens élus, Messieurs Puigdemont et Comín, est différente, puisque leur jugement est suspendu pour ne pas s’être présentés à la convocation judiciaire dont ils ont été l’objet en son temps, en fuyant à l’étranger. Il faut se souvenir, à ce propos, que si un mandat européen d’arrêt et de remise fut bien émis et refusé par les États membres de l’UE qui furent sollicités, l’ordre intérieur de détention pour les mettre à la disposition de la justice est toujours en vigueur. Ce qui implique que, s’ils se présentent pour retirer les lettres de créance, il est prévisible qu’ils seront arrêtés et mis à la disposition du Tribunal suprême. C’est donc ce Tribunal qui déterminera s’ils restent en liberté provisoire en attente du jugement ou, au contraire, s’ils rentrent en détention provisoire. Dans la seconde hypothèse, ils devront être autorisés par le Tribunal suprême lui-même à se présenter devant la Chambre des députés pour retirer les lettres de créance et prêter le serment prévu. Tout cela devra aussi être notifié au Parlement européen pour suite pertinente.

 Il faut rappeler aussi que les services juridiques du Parlement européen, sur les instances du [toujours] président Monsieur Tajani, ont publié un rapport ratifiant le fait que ce sont les règles nationales qui s’appliquent dans les élections au Parlement européen, y compris les exigences pour acquérir la pleine condition de députés européens.

 Arrivés à ce point, il est opportun de se demander pour quoi il est important, pour les trois députés élus, d’arriver à être députés au Parlement européen. Et bien, simplement, pour jouir de l’immunité que cette Chambre octroie à ses membres. Mais pour cela, il ne suffit pas d’être député élu. Il faut être député à toutes fins utiles.

 Il est clair que, certainement, les trois personnes affectées présenteront un recours devant la Cour de Justice de l’Union européenne. C’est peut-être bon qu’ils le fassent, pour que ce soit cette Cour qui clarifie, une fois pour toutes, l’imbroglio dans lequel nous conduit le sécessionnisme, à tous les niveaux.

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Information sur ce site web:

YOUNEWS.LARAZON.ES:

Dos casos para la UE: presos y fugados - Younews - Younews

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(1) Teresa Freixes Sanjuan, Secrétaire générale de l'Académie royale européenne des Docteurs.

Teresa Freixes Sanjuan, académicienne de l'Académie royale européenne des Docteurs, a été nommée Secrétaire générale de cette institution le 4 décembre 2018.


Sous la déclaration officielle du Président de cette Académie, on faisait le commentaire
suivant à propos de cette nomination :


« La professeure de Droit constitutionnel Teresa Freixes a reçu une reconnaissance plus
que méritée, pour sa stature intellectuelle et son prestige académique.
Cette prestigieuse professeure, qui détient aussi la chaire Jean Monnet, a été nommée
Secrétaire générale de la Académie royale européenne de Docteurs.
Teresa Freixes a remercié pour cet honneur et a assuré qu’elle espère, depuis cette
position, « pouvoir continuer et améliorer la défense des valeurs constitutionnelles et
européennes ».


Source: Nueva Secretaria General de la Real Academia Europea de Doctores

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