Mon cadeau des Rois Mages 2013 (1/2)

Je vous offre comme cadeau des Rois Mages une étude personnelle, iconographique et commentée, de la composition de "L'Adoration des Rois Mages" par Pierre Paul Rubens.

Une des raisons de l'intérêt exceptionnel de ce tableau, en plus de sa valeur iconique propre de chef-d'œuvre, réside dans le fait qu'il révèle l'évolution de l'iconologie d'un peintre génial, puisque l'œuvre a été peinte en 1609 et ultérieurement amplifiée et modifiée par Rubens lui-même, à Madrid, entre 1628 et 1629.

Mes réélaborations photographiques s'appuient sur une photographie de haute résolution, du domaine public, de cette œuvre du Musée du Prado à Madrid.



001. L'Adoration des Rois Mages

Pierre Paul Rubens, 1609; 1628-1629
Huile sur toile – Baroque
355,5 cm x 493 cm
Musée du Prado, Madrid, Espagne

L'Adoration des Rois Mages, qui appartient à la collection du Musée du Prado (Madrid, Espagne), est un tableau du peintre flamand baroque Pierre Paul Rubens considéré depuis longtemps comme un de ses chefs-d'œuvre.

Il fut réalisé en 1609, bien que, ultérieurement, Rubens lui-même le retravailla et l'amplifia entre 1628 et 1629, pendant son second voyage en Espagne.

Description

La peinture, une des plus grandes en dimensions dans la collection du Prado, se caractérise par ses coloris – dans lesquels ressortent les jaunes, rouges et violets –, par son mouvement et son faste.

Bien qu'elle soit une des plus spectaculaires et foisonnantes de Rubens, elle est clairement organisée, avec un axe diagonal qui part symboliquement de l'Enfant Jésus et arrive jusqu'à l'angle opposé, à l'extrême supérieur droit. Tout aussi symboliquement, le peintre situe dans le visage de l'Enfant le foyer de lumière qui éclaire toute la scène.

Dans la frange ajoutée à droite, Rubens a intégré son autoportrait. Il s'est représenté à cheval, avec une épée et une chaîne d'or, reflétant de la sorte la condition nobiliaire que Philippe IV lui avait concédée en 1624. C'est la seule fois qu'il intégra son autoportrait non équivoque dans une peinture narrative.

Source : Wikipédia

Rubens venait de rentrer d'Italie quand il reçut de la Ville d'Anvers, en 1609, la commande de l'Adoration des Mages, avec laquelle la Ville souhaitait décorer la salle où les représentants d'Espagne et des Provinces Unies des Pays-Bas avaient signé la Trêve de Douze Ans. Trois ans plus tard, Anvers offrit l'œuvre à Rodrigo Calderón, ambassadeur extraordinaire du roi d'Espagne. Après sa disgrâce et son exécution, la peinture fut confisquée par la Couronne en 1621. En 1628-1629, pendant son second séjour en Espagne, Rubens décida de retravailler le tableau.

L'Adoration des Mages fut peinte pour le salon où venait d'être signée, en 1609, la Trêve de Douze Ans entre l'Espagne et les provinces protestantes dissidentes du nord des Pays-Bas. La trêve apporta une interruption temporaire à la guerre atroce qui, depuis 40 ans, plongeait dans un bain de sang les villes et les campagnes des Pays-Bas. Le thème du tableau offrait la possibilité d'une interprétation politique : les rois, gouvernants de leur époque, viennent rendre hommage au Christ, Prince de la Paix, et apportent avec eux la santé et le bien-être.

Source : Gabriele Finaldi, directeur adjoint de conservation du Prado, commentaire sur cette œuvre au moment de sa restauration, entre 2000 et 2002.

002. Les Rois Mages Adorant l'Enfant Jésus



"Rubens a peint l'Adoration des Mages comme un nocturne. Saint Joseph et la Vierge apparaissent à l'entrée d'un temple en ruines, qui symbolise l'extinction de l'ancien régime païen et l'annonce de la nouvelle Loi, pour présenter l'Enfant Jésus aux trois Mages. Selon Saint Mathieu (le seul évangéliste qui rapporte leur visite), il s'agissait d'hommes sages venus d'Orient, mais pour Rubens (comme pour une grande partie des peintres occidentaux) c'était des Rois. Ils portent de magnifiques vêtements royaux, brodés d'or et doublés de fourrure, ainsi que des bijoux précieux, et sont accompagnés d'une suite royale de pages, soldats et esclaves.

Rubens amplifia et modifia son tableau entre 1628 et 1629, pendant son second voyage en Espagne. Mais il ne se limita pas à peindre les nouvelles parties du tableau. La demande de l'agrandir lui donna l'opportunité d'observer son travail antérieur avec un regard critique et de le réviser en accord avec sa vision artistique de la fin de la décade de 1620. Les changements qu'il introduisit apparaissent avec évidence en comparant le tableau tel qu'il nous apparaît aujourd'hui avec le document radiographique et avec une copie, toujours disponible, réalisée avant l'amplification.

Il changea le profil de la Vierge, la dotant d'un visage plus plein, et remplaça le gris pâle de sa tunique par un bleu foncé. Il introduisit aussi de petites modifications dans les personnages, rectifiant légèrement leurs attitudes ou les détails de leurs vêtements. Dans le cas du roi noir, il changea l'aspect de l'encensoir, apparemment pour qu'il se détache moins."

Source : Gabriele Finaldi, directeur adjoint de conservation du Prado, commentaire sur cette œuvre au moment de sa restauration, entre 2000 et 2002.

003. L'Enfant Jésus jouant avec les pièces d'or.



Rubens a mis un accent particulier sur les présents qu'apportent les trois Rois Mages. Le roi qui est agenouillé offre un récipient d'or rempli de monnaies; l'Enfant, curieux, prend l'une d'entre elles. On interprète le cadeau de l'or comme représentant la majesté du Christ, mais l'Enfant saisit la monnaie comme s'il s'agissait de l’Ostie Sacrée. C'est peut-être une allusion intentionnelle à sa mission sacerdotale, qui est aussi évoquée par l'étole accrochée à un côté de la couche.

Les tableaux sur l'Adoration des Mages présentaient un attrait spontané pour les gouvernants, spécialement les plus pieux, parmi lesquels se trouvait indiscutablement Philippe IV. Les Médicis de Florence, qui devaient leur spectaculaire ascension politique à leurs activités de banquiers et à leur réseau de parrainage ancré dans leur extraordinaire richesse, commandèrent plusieurs tableaux de l'Adoration des Mages à Benozzo Gozzoli, Boticelli et Filippo Lippi; dans certains de ces tableaux, les rois ont les traits de membres de la famille.

Les offrandes des mages à l'Enfant Jésus procurent une justification religieuse à leur richesse et à leur ascension au pouvoir : si les Médicis employaient leur capital au bénéfice de l'Eglise, leur importance politique s'en trouverait légitimée. Louis XIII de France lui-même, beau-frère de Philippe IV, s'était fait représenter comme un des rois dans l'Adoration des Mages de Justus d'Egmont (Paris, Musée du Louvre). L'Adoration de Rubens fut accrochée au Palais Royal de Madrid.

Source : Gabriele Finaldi, directeur adjoint de conservation du Prado, commentaire sur cette œuvre au moment de sa restauration, entre 2000 et 2002.

004. Les anges chantant le "Gloria in excelsis Deo"



Dans la bande ajoutée dans la partie supérieure, que Rubens amplifia entre 1628 et 1629, pendant son second voyage en Espagne, il a peint un ciel matinal, accentuant la transition de la nuit au jour à travers le tableau, et consolidant le thème de l'Epiphanie comme nouvelle aube historique. Les deux anges, qui donnent à l'événement un caractère joyeux et surnaturel, ont également été ajoutés à ce moment.

Source : Gabriele Finaldi, directeur adjoint de conservation du Prado, commentaire sur cette œuvre au moment de sa restauration, entre 2000 et 2002.

005. Le militaire du XVIIème siècle, croyant ou ambitieux ?



Il s'intéresse à l'Enfant Jésus ou à l'or que celui-ci reçoit et avec lequel il joue ?

006. Les esclaves des Rois Mages



Les deux esclaves musclés, aux réminiscences formelles et thématiques de Michel Ange, portent les offrandes des Rois Mages.

L'évident effort surhumain des deux esclaves, sous le poids des charges qu'ils transportent, fait penser que Rubens veut attirer l'attention des destinataires de son œuvre sur la condition asservissante des travaux serviles, aussi bien à l'époque de Jésus qu'à sa propre époque.

007. Addition de 1628-1629 dans la partie droite du tableau.



Dans la partie extrême droite du tableau, que son auteur agrandit entre 1628 et 1629, pendant son second voyage en Espagne, Rubens ajouta, en bas, le portrait de son jeune assistant avec son cheval et, vers le milieu, là où arrive une lumière qui provient de l'Enfant Jésus et illumine le visage d'un personnage du XVIIème siècle, son propre portrait de croyant, de dos, comme s'il considérait terminée sa nouvelle intervention créative, mais se retournant pour regarder l'Enfant Jésus nouveau-né, et comme s'il était en train d'observer l'œuvre qu'il avait réalisée quelque 20 ans plus tôt. De gigantesques chameaux et des serviteurs avec des torches occupent la partie supérieure de ce côté droit ajouté à la composition.

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